Mercredi 24 mai 2023, BE SMART reçoit Henry Buzy-Cazaux (Président fondateur, Institut du Management des Services Immobiliers) et Erwann Tison (Directeur des études, Institut Sapiens)
Le logement s’enfonce dans la crise
Le 5 juin, Elisabeth Borne a dévoilé les conclusions des travaux du Conseil national de la refondation (CNR) sur les problématiques liées au logement. Les principales mesures du plan du gouvernement, comme l’arrêt du dispositif Pinel et du prêt à taux zéro pour les maisons, n’ont pas convaincues les professionnels de l’immobilier. Au premier trimestre 2023, seulement 16 912 logements neufs ont été lancés commercialement en France, selon la Fédération des promoteurs immobiliers, un plus bas depuis la création de la FPI en 2010.
Le logement est-il une « bombe sociale » à retardement ?
Envolée du coût des matériaux, de l'énergie, taux d'intérêts en hausse, durcissement des conditions de crédit, réglementations plus strictes… les Français ont de plus en plus de mal à devenir propriétaires. Plus grave, le logement s’est hissé en première place du classement des dépenses contraintes des ménages français. Selon l'indice national des dépenses contraintes publié chaque année par le comparateur lesfurets.com, il représentait près de 62% de ces dépenses l’an dernier.
Pourtant, les Français semblent s'être résignés : « Dans les enquêtes d’opinion réalisées lors de la dernière élection présidentielle, il est apparu que la première préoccupation des Français, c’était leur pouvoir d'achat (...) quand le thème du logement arrivait parfois en 9ème position, alors qu’en réalité, c’est le premier poste budgétaire des Français », indique Henry Buzy-Cazaux, président fondateur, Institut du Management des Services Immobiliers. « C’est devenu une charge contrainte tellement admise, que lorsque l’on demande aux ménages s'ils souffrent du logement, ils répondent que non, ils souffrent du pouvoir d’achat. C’est pourtant le logement qui limite la marge de manœuvre pour aller au cinéma, pour manger… », explique-t-il.
Et la tendance devrait s’accentuer dans les années à venir en l'absence de politiques publiques fortes. Dans une note publiée en mars dernier, l’Institut Sapiens montre qu’entre 2020 et 2021, les prix du logement ont augmenté quatre fois plus vite que l'inflation et les gains de pouvoir d’achat.
La réponse à cette crise du logement apparaît inévitablement politique. Malheureusement, les effets des mesures qui s’imposent pour le logement s’inscrivent dans le temps long, quand le pouvoir d’achat est lui une préoccupation immédiate. « Il y a un horizon temporel qui est différent entre le pouvoir d'achat et le logement. En cinq ans, c’est difficile de voir les effets d’une politique du logement alors qu’un chèque alimentaire, cela se voit tout de suite », constate Erwann Tison, le directeur des études de l'Institut Sapiens.
La crise du logement creuse aussi les inégalités au sein de la société française selon lui. « Le taux de propriétaires parmi les 25 % des Français les plus pauvres, a baissé de 8 points depuis 35 ans, quand sur la même période le taux de propriétaires parmi les 25 % les plus riches a augmenté de 20 points ».
