Filière BIO : comment sortir de la crise ?
Lundi 11 septembre 2023, SMART IMPACT reçoit Loïc Coulombel (Vice-président, Comité National pour la Promotion de l’Œuf) et Philippe Camburet (Céréalier bio dans l’Yonne, Président, Fédération nationale d’agriculture biologique)
Plombé par l’inflation, le bio perd du terrain en France. Selon l’institut Circana, la part de la filière dans la grande distribution serait passée sous les 4 % à l’été 2023, plus bas niveau depuis 2018. Face à cette contraction, plusieurs voix s’élèvent pour appeler le gouvernement à soutenir le secteur. On en parle dans SMART IMPACT avec Loïc Coulombel, vice-président du Comité national pour la promotion de l’œuf et Philippe Camburet, président de la Fédération nationale d’agriculture biologique.
Les chiffres permettent de donner de la consistance aux ressentis du terrain. Ici, on parle d’agriculteurs convertis au bio qui aujourd’hui seraient « en grande difficulté » et envisageraient d’arrêter, selon Philippe Camburet. La donnée qui valide le retour d’expérience vient de l’institut Circana, qui affirmait dans une note début juillet que la part des produits bio dans les circuits de la grande distribution était tombée sous les 4 %.
Moins de bio en France en 2023 ?
La cause ? L’inflation est forcément pointée du doigt, car « le contexte inflationniste ne donne pas de signes encourageants ». Mais à en croire Loïc Coulombel, vice-président du Comité national pour la promotion de l’œuf, les problèmes ont commencé en amont avec « un paquet législatif datant de début 2022 » qui a contribué à rendre le produit « 25 % plus cher à produire qu’avant ». Or, au moment de faire des arbitrages au supermarché, les consommateurs français les plus modestes se tournent naturellement vers ce qui est moins coûteux.
Même si les statistiques du secteur sont difficiles à obtenir, Philippe Camburet craint que l’on « fasse le bilan d’une année 2023 avec moins de bio en France qu’en 2022. » Et quand on évoque des chiffres économiques décevants, cela se traduit par des dégâts humains en bas de la chaîne de production. « On a malheureusement pas mal de déconversion » souligne Loïc Coulombel, alors que le passage à une production bio « cela peut être le choix d’une carrière, c’est beaucoup d’investissement personnel et une réflexion sur sa manière de travailler » insiste Philippe Camburet.
Trop de règlements et pas assez de temps ?
La crise de 2023 n’est toutefois pas une première selon le céréalier bio basé dans l’Yonne, « on a connu par le passé des plateaux, et on s’en est sorti », mais son enthousiasme est douché par la conjoncture, « un phénomène économique massif » difficile à contrer sans l’aide des pouvoirs publics. « On a besoin de plusieurs centaines de millions d’euros pour que l’on sécurise les filières, que l’on sécurise les gens qui se sont engagés dans la conversion. »
Même revendication pour Loïc Coulombel, qui estime qu’en France, « on empile les règlements et on n’attend pas d’avoir absorbé les conversions ». L’État aurait tort de croire le secteur suffisamment mature, selon Philippe Camburet, car malgré la croissance, celui-ci reste « fragile », et se pose la question de la réelle « ambition de l’aide publique envers les producteurs ».