LE GRAND DÉBRIEFSMART TECHlun. 13/11/23

Lundi 13 novembre 2023, SMART TECH reçoit Alain Garnier (Président fondateur, Jamespot) , Jean-Noël De Galzain (président d’Hexatrust) et Alain Staron (président cofondateur, Artifeel)


L’UE fâchée contre le projet de loi SREN ?

Sécuriser l’espace numérique, oui… mais en se conformant aux législations européennes ! C’est un peu le discours adressé récemment par la Commission européenne au gouvernement français. En effet, Bruxelles craint que le projet de loi SREN récemment voté à l’Assemblée nationale ne soit plus restrictif que les règles de l’UE. On en parle dans le grand débrief de SMART TECH en compagnie de Jean-Noël de Galzain, président d’Hexatrust, Alain Garnier, président-fondateur de Jamespot, et Alain Staron, président d’Artifeel.

Espace numérique : la France va-t-elle trop vite pour l’Europe ?

Le projet de Loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique sera prochainement examiné en commission mixte paritaire, après avoir été adopté à l’Assemblée nationale le 17 octobre dernier. Mais entre ce que la France voudrait faire et ce que le cadre européen lui impose, le décalage persiste. Comment concilier deux visions du même problème ? C’est le débat de SMART TECH.

On ne peut visiblement pas accuser Jean-Noël Barrot de frilosité. Le ministre délégué chargé de la Transition numérique et des télécommunications a reçu cet été un courrier piquant du commissaire européen à l’industrie. Thierry Breton y critique vertement les dispositions qui visent à encadrer les influenceurs et à instaurer une majorité numérique à 15 ans en France. « Le ministre ne peut pas prendre tous les amendements qu’on lui propose » sous peine de sortir totalement du cadre européen, le DSA, rappelle Jean-Noël de Galzain, le président d’Hexatrust.

Un sujet, 27 Europes ?

Pour Alain Garnier, président fondateur de Jamespot, la situation entre Paris et Bruxelles est ambivalente. « D’un côté, la France a été celle qui a amené le sujet au niveau européen, mais de l’autre, aller un peu trop loin, c’est risquer d’avoir 27 “Europes” sur le sujet ». Une vision partagée par Alain Staron, président d’Artifeel. Mais pour lui, c’est moins la France qui va trop loin que l’Europe qui prend du retard. « Il y a une différence de tempo, l’Europe ne va clairement pas assez vite, alors que le sujet le nécessite. » Malgré tout, il reste partisan d’un alignement européen, car « si on va trop vite pour l’Europe, on la casse. Or, l’Europe dans son entièreté est plus forte que n’importe quel pays qui voudrait aller plus loin, seul. » Moins loin ensemble, plutôt que plus loin séparément, pour la simple raison qu’une « Europe désorganisée, c’est une Europe fragilisée. »

Pour éviter la fragmentation, Jean-Noël de Galzain invite à se pencher sur le sujet de fond « autour des données ». Alain Garnier estime que sur le domaine du B to B, « le consensus est général, sur la question de la vie privée en revanche chaque vision est différente ». Ce qui pose le problème du positionnement du curseur, de la reprise en main du contrôle de la data, « un enjeu mondial », estime de Galzain, sur lequel les États européens doivent composer avec leurs propres différences, mais sans oublier de prendre en compte « les lois extra-territoriales, notamment américaine… »

« Tant pis si les Français doivent attendre »

L’équation complexe nécessite donc encore beaucoup d’échanges et de compromis. « Dans le secteur de l’innovation, nous sommes habitués à aller très vite » juge Jean-Noël de Galzain, tout en admettant que pour des personnes extérieures aux secteurs de la technologie, « le DSA puisse paraître comme un concept très abstrait ». Pour Alain Staron néanmoins, les solutions pourraient paradoxalement venir des profanes. « La volonté politique peut être source d’innovation, les ingénieurs, notamment dans des pays comme la France, sont suffisamment brillants pour trouver des solutions » pour répondre aux idées novatrices. Surtout, le président d’Artifeel exhorte à regarder le positif : « voyant d’où vient l’Europe, le DSA est déjà une très belle étape, tant pis si les Français doivent attendre un peu plus ».